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Multimedia et Culture

REFLEXION SUR LE MULTIMEDIA DANS LES LIEUX PUBLICS FACE AUX CONTRAINTES SANITAIRES DU COVID 19

 

Vous êtes quelques scénographes ou responsables multimédia à nous avoir interrogé sur les questions de compatibilité sanitaire des équipements, et voici ce que nous pouvons vous suggérer en cette période inédite d’adaptation.

 

Pour les lieux d’accueil des publics existants

 

Le premier réflexe qui vient à l’esprit

Il semble logique de :

- bâcher les écrans tactiles, les tables multitouch et toutes les stations hybrides impliquant des manipulations physiques, des boutons, des potentiomètres, des casques, car nous savons tous que les enfants mettent leurs doigts absolument partout et qu’il est difficile de les contraindre

- redoubler de vigilance sur le nettoyage des équipements de prêt (audioguides, visioguides, tablettes)

- favoriser les publics à télécharger les applications mobiles sur leur smartphone personnel

 

Alternatives “Covid-compliant”

Il ne nous semble pas utile d’être aussi radical :

- Pour éviter le contact physique des publics avec les écrans tactiles et les mettre en confiance sur ce point, nous recommandons de prêter un stylet capacitif propre au visiteur, délivré au moment de l’achat du billet. Du point de vue logistique, le stylet capacitif peut être restitué dans un bac en fin de visite (avec supervision par un agent de surveillance par exemple), puis facilement nettoyé et séché par lot, avant d’être restitué à la billetterie.

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- On peut envisager de mettre à disposition un distributeur de gel hydro-alcoolique à proximité de la billetterie, pour permettre au visiteur de nettoyer immédiatement le stylet qu’il vient de recevoir si il/elle a le moindre doute. – Il semble nécessaire de rendre le masque obligatoire et rappeler aux parents d’être très vigilants avec leurs enfants qui prendraient le risque de toucher le mobilier et les écrans de ne surtout pas porter les doigts au visage.

- Mettre à disposition des distributeurs de gel hydro-alcoolique à proximité des écrans. Celà permet aux publics de se laver régulièrement les mains, en particulier ceux qui préfèreront toucher les écrans tactiles malgré tout.

- Nettoyer régulièrement les écrans tactiles et boutons poussoirs en aspergeant d’abord le chiffon plutôt que la vitre de l’écran, de façon à ne pas laisser s’infiltrer le liquide dans les interstices et jointures du mobilier d’écran. Les vitres des écrans ne craignent pas nécessairement le liquide, s’agissant de vitres standards pour les écrans à cadre infra-rouge et effet capacitif projeté. Il est néanmoins recommandé de vérifier les spécifications pour certains modèles d’écrans à technologie SAW (Elo Touch par exemple) dont la surface en plastique pourrait être sensible à certains produits détergents.

A noter que :

- Les écrans multitouch grand format ne nécessitent pas tous un contact physique. Sur les écrans multitouch à cadre infrarouge par exemple, il suffit d’approcher le doigt d’un peu moins d’un centimètre sans toucher la vitre, et cette technologie n’est pas rare (dès lors que l’écran est enfoncé d’environ 1 cm par rapport à son cadre). C’est une recommandation qui peut être communiquée aux publics.

 

Pour les lieux d’accueil des publics en cours de conception

Dans le cas où la situation viendrait à durer ou se répéter, il est légitime de se poser la question des types d’interactions à préconiser dans les espaces d’accueil des publics.

Le première réaction serait d’accompagner la visite avec des vidéo-projections et diffusions sonores dans les salles, en limitant l’interaction au mobile personnel du visiteur. Celà soulèvera quelques questionnements sur la mise en oeuvre du choix de la langue de la vidéo in-situ mais les solutions ci-dessous peuvent y répondre. Celà soulèvera aussi la question de la proportion d’utilisateurs sur mobile dans le cas où l’équipement n’est pas prêté.

La seconde pensée serait de prendre le parti-pris de la salle immersive avec son et vidéo-projections murales, de type cave ou Atelier des Lumières, qui finalement ne subit que la contrainte de jauge limitée tant que l’obscurité n’est pas totale.

Pour ne pas condamner trop vite l’interactivité, en plus des mesures précédentes, voici quelques idées et approches séduisantes compatibles Covid, qui pourront vous sembler évidentes mais qui ont le mérite d’être formalisées.

 

La question des boutons physiques, potentiomètres et objets physiques à manipuler

Certaines interactions “touchless” simples peuvent devenir des alternatives esthétiques aux boutons poussoirs en travaillant avec la lumière :

- en soignant bien le design du mobilier, on peut envisager que le visiteur doive occulter un faisceau lumineux avec sa main. Il s’agit de placer un capteur d’intensité lumineuse sous l’icône du bouton (gravé ou sérigraphié à la surface du meuble) et d’intégrer au mobilier un éclairage directif sur cette icône. De la même façon, un capteur de type télémètre permet de détecter une main qui s’approche du bouton sans le toucher, en considérant la distance de 0 à 10 cm. Par contre, ces derniers sont plus difficiles à dissimuler, car ils ne peuvent pas être occultés par une vitre ou un plexiglass.

 

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- on peut envisager que le visiteur doive passer son doigt dans un trou rétroéclairé, sans en toucher les bords

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- on peut envisager que le visiteur doive approcher sa main d’un petit plot semi-sphérique sans le toucher, à une distance de 0-10 cm par exemple (dispositif similaire à l’interaction ci-dessous).

 

Certaines interactions “touchless” en alternative aux faders, sliders, boutons/potentiomètres rotatifs : ceux-ci ont la particularité de renvoyer une valeur variable. On peut envisager d’utiliser une gestuelle de balayage de la main de haut en bas ou de gauche à droite, détectée par un capteur de type télémètre à ultra-sons. Il s’agit là encore de matérialiser la zone d’interaction avec un faisceau lumineux directif qui éclaire le dessous ou dessus de la main, ainsi qu’une signalétique appropriée pour inciter à cette gestuelle. L’intensité lumineuse pourrait d’ailleurs être modulée dynamiquement, afin d’inciter le visiteur à approcher la main à des moments précis du scénario d’interaction, voir même être synchronisée sur les variations si celà fait sens.

 

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S’agissant des objets physiques à manipuler, nous n’avons pas d’alternative solide au nettoyage des mains à proposer, mis à part que le multimédia pourrait compenser dans certains cas.

 

Les interactions sur écrans tactiles et tables multitouch

Comme évoqué précédemment, il est pertinent de penser un parcours de visite muni d’un stylet capacitif. Bien entendu, en tant que visiteur il faut rester vigilant à ne pas toucher la tête du stylet avec ses doigts ni la porter à la bouche, ce qui implique de le manipuler et le transporter d’une façon adéquate. Le fait de communiquer un stylet capacitif au visiteur est par ailleurs l’opportunité d’étendre cet objet à un outil de personnalisation du parcours (agissant comme un badge NFC), bien que ce type d’objet n’existe pas encore sur le marché. Le visiteur pourrait devenir acteur de sa visite en effectuant des choix tout au long de son parcours, restitués avec une analyse en fin de parcours, ou encore en enregistrant certaines actions ou créations en audio, vidéo, ou images que le visiteur peut retrouver ensuite, et partager.

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La technologie de cadres infra-rouge qui permet d’encadrer les écrans standards pour les tactiliser ne nécessite pas de contact physique pour fonctionner car il s’agit d’une fine matrice de lasers invisibles déployée devant l’écran. Ainsi, on pourrait éloigner le cadre de l’écran de façon à laisser un espace de quelques centimètres entre la zone tactile et l’écran, et créer un effet tactile devant l’écran, ce qui ne nécessite pas de le toucher.

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Pour éviter de pérenniser cette situation temporaire, si le design du support d’écran permettait d’ajuster cette distance entre le cadre et l’écran, celà permettrait d’activer ou désactiver facilement ce mode qu’on pourrait appeler “mode Covid’.

 

Les interactions avec caméra 2D/3D

Les interactions de type LeapMotion / Kinect existent depuis plusieurs années et ont fait leurs preuves, notamment dans des dispositifs de type mirroir augmenté et photobooth interactif. Bien que restreinte à un usage individuel et nécessitant un peu plus de vigilance en maintenance, la caméra 3D type Kinect peut être très appropriée quand le propos est en lien avec le corps humain. La Kinect est peut être moins pertinente s’il s’agit de detecter des gestuelles simples là où Leap Motion est efficace pour détecter les gestes de la main et en particulier un doigt pointé vers l’écran (pour chaque main), qui est déjà dans le vocabulaire gestuel commun, se rapprochant fortement du “touch”.

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Le mobile personnel comme compagnon de visite

Comme évoqué au départ, il est logique de favoriser ce concept de visite en période de crise sanitaire. Néanmoins, si on prend le parti d’un portail captif full web pour contourner le frein psychologique du téléchargement d’une application de visite sur son smartphone, celà induit de s’appuyer sur un réseau wifi fiable et une couverture de l’ensemble des pièces du musée, ce qui peut constituer un coût non négligeable à la fois en mise en oeuvre et en gestion.

Par ailleurs, le parti-pris d’une application téléchargeable dont les contenus seraient tous préchargés soulève la question du poids de l’application au téléchargement. Il reste la connectivité 3G personnelle des visiteurs sur laquelle s’appuyer qui peut aussi parfois faire défaut notamment dans les sous-sols du bâtiment.

Les autres questions sont de savoir si le visiteur a envie de se replonger dans son smartphone quand il entre dans le lieu en couple, en groupe, en famille, voir seul, à part pour prendre des photos bien sur; et de savoir si les parents sont prêts à confier leur smartphone à leur enfants.

 
 
Schémas et illustrations : Devocité

 

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